Au-delà de la grâce présidentielle

Le 31 janvier la Présidence de la République a publié ce communiqué:

«Le président de la République, en application de l’article 17 de la Constitution et après avis du ministre de la Justice, a décidé d’accorder à Jacqueline Sauvage une remise gracieuse de sa peine d’emprisonnement de 2 ans et 4 mois, ainsi que de l’ensemble de la période de sûreté qu’il lui reste à accomplir.

Cette grâce lui permet de présenter immédiatement une demande de libération conditionnelle.

Le président de la République a voulu, face à une situation humaine exceptionnelle, rendre possible, dans les meilleurs délais, le retour de Jacqueline Sauvage auprès de sa famille, dans le respect de l’autorité judiciaire.»

Certes, on peut penser que le Président a cédé à la pression populaire et a pris sa décision dans une relative précipitation.

Je pense que sa décision est mesurée et intelligente.

En effet comment pourrait-on admettre qu'un homme, fût-il Président de la République désavoue deux jurys populaires d'une décision qu'ils ont forcément prise en leur âme et conscience.

Bien que l'horreur, le calvaire subit par Madame Sauvage et ses filles pendant plusieurs dizaines d'années nous entraîne légitimement à trouver toutes les circonstances atténuantes possibles, rien au regard strict du droit n'autorisait cette femme à tirer à trois reprises dans le dos d'un homme aussi odieux soit-il.

Le Président de la République a donc fait preuve d'humanité dans cette affaire tout en respectant la justice en prenant la précaution de ne pas effacer la décision des jurés populaires. Madame Sauvage normalement et fort heureusement va pouvoir retrouver sa famille et le droit aura été parfaitement respecté.

N'oubliez pas que ces jurés sont des citoyens comme vous et moi et que la parité de ces deux jurys d'assises était semble-t-il parfaitement respectée, ce qui écarte toute suspicion de décision sexiste.

Au-delà de cette affaire il y la maltraitance des femmes en général.

Tout au long du temps médiatique consacré au cas de madame Sauvage et de ses filles, à juste titre sans doute, l'extrême majorité des intervenants a dénoncé l'inaction des services sociaux, voire la légèreté de traitement de ces affaires par la police et même de la justice.

Une chose m'a frappé, m'a choqué même. Je n'ai quasiment jamais entendu remettre en cause le comportement des plus proches, père, mère, enfants, frères ou sœurs. Avant même les services publics, n'est-ce pas aux plus proches que revient l'obligation d'assistance à personne en danger?

Avant d'accuser la terre entière, ne devrions-nous pas nous remettre en cause nous-même? Et puis, que savons-nous faire pour dissuader une femme battue de retourner auprès de son tortionnaire alors que la douleur des coups s'est à peine estompée?

Alors, même si on ne peut pas empêcher ce retour, est-ce une raison pour ne pas aller témoigner, dénoncer auprès des services publics ces maltraitances?

Et, qu'est-ce qui exonère le policier, le gendarme d'ouvrir un dossier et de mener une enquête même si la femme battue n'a pas déposé plainte? Rien!

Un agent de la force public qui constate un flagrant délit de vol n'attendra pas que le propriétaire porte plainte pour ouvrir et instruire un dossier. Pourquoi devrait-il en être autrement dans les affaires de maltraitances faites aux femmes ou à toute personne vulnérable, enfants ou vieillards?

Législateur, il y a encore beaucoup de choses intelligentes à faire pour la protection de l'humain. Le principe de précaution dont on use et abuse parfois n'est pas la réponse à tout.

En attendant n'oublions pas de mémoriser ces numéros qui chaque jour peuvent sauver des vies.

Composez le 3919 pour les violences conjugales, le 119 pour l'enfance maltraitée, le 0 800 95 95 pour le viol, le 3677 pour les maltraitances des personnes âgées et /ou handicapées).

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